SÉANCE D’HOMMAGE DE LA FONDATION SALUS SANGUINIS AU PROFESSEUR GUY CORNU

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Publié dans la revue de : Décembre 2016 Rubrique(s) : Salus Sanguinis
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Résumé de l'article :

En date du 17 octobre 2016 était organisée au Château Saint-Anne par les Amis de la Fondation Salus Sanguinis une séance d’hommage au Professeur Guy Cornu. Le Louvain Médical a souhaité perpétuer cet évènement en publiant dans leur intégralité les quatre discours prononcés à l’occasion de cet évènement.

Outre son investissement majeur dans la Fondation Salus Sanguinis dont témoignent les discours, le Professeur Guy Cornu, président de l'ECU-UCL (Enseignement Continu Universitaire) pendant de nombreuses années, a également contribué activement au succès de notre revue en éditant des numéros spéciaux annuels à chacun de leurs congrès. Tout le comité éditorial du Louvain Médical tient à lui exprimer sa gratitude et sa reconnaissance.

Article complet :

Discours du Professeur Georges-Albert Dal, Président du Conseil d’Administration de la Fondation d’Utilité Publique Salus Sanguinis

Mesdames,

Mesdemoiselles,

Messieurs,

C’était le 9 janvier dernier. Philippe Stroobant et moi avons reçu la lettre suivante par la voie électronique :

Cher Georges et Philippe,

Après plus de 40 ans d’activités et 25 années de conseiller scientifique au sein de Salus Sanguinis, rentrant par ailleurs dans ma quatre-vingtième année, je me dois de vous présenter ma démission et de vous demander de ne pas renouveler mon mandat d’administrateur au sein de la Fondation.

J’ai gardé pour Salus Sanguinis l’enthousiasme et l’admiration vis-à-vis des nombreux objectifs que vous avez contribués à réaliser tout le long de ces années. Sachez que je vous en serai toujours reconnaissant. La recherche médicale est indispensable pour améliorer la qualité des soins, et donc de la vie ! Je formule des vœux de pleine réussite pour vos futurs projets et vous assure de mon fidèle soutien. Je serais très sensible à ce que vous transmettiez mon souvenir amical à tous les membres du Conseil d’administration, notamment à mes collègues médecins. Je vous remercie enfin, tous les deux, de votre remarquable dévouement à la cause de la Fondation et vous prie d’agréer, chers amis, l’assurance de ma profonde amitié.

Ainsi donc, Guy Cornu mettait à exécution un projet qu’il avait déjà évoqué à quelques reprises, mais dont nous espérions tous secrètement qu’il le postposerait.

Tout est dit dans cette lettre, qui est bien à l’image de son auteur, alliant précision scientifique, chaleur humaine et élégante modestie. Quel paradoxe en effet que d’entendre exprimer sa reconnaissance celui à qui elle est due au tout premier chef ! Et cette évocation discrète de « plus de 40 ans d’activités » par la cheville ouvrière de Salus Sanguinis depuis sa création. Depuis 1975, ce qui était à l’origine une association sans but lucratif, devenue depuis une fondation d’utilité publique, œuvre sans relâche à l’accomplissement de la mission qu’elle s’est fixée : stimuler et soutenir la recherche dans le domaine des maladies du sang, de la moelle osseuse et des ganglions. Année après année, nous participons au financement de programmes de recherche sélectionnés par notre comité scientifique avec l’aval du FNRS.

Ce soutien à la recherche, indispensable à l’amélioration de la qualité des traitements hématologiques et donc à l’accroissement des chances de guérison des patients, nous le devons à l’ensemble de nos donateurs, et à tous ceux qui, de façon totalement bénévole, œuvrent au sein de notre conseil d’administration, du comité d’organisation et des ressources et du comité scientifique. Vous me permettrez de ne pas citer ici les noms de tous ces membres bénévoles car en fait, nous sommes ici en famille et nous nous connaissons tous.

Faut-il insister sur le rôle primordial du secrétaire scientifique, fonction que Guy Cornu a exercée pendant 25 ans, avant de passer le relais à Pierre Coulie. Ce rôle important d’initiative et de coordination, il l’a exercé tout en menant l’impressionnante carrière que nous lui connaissons, qui le vit s’investir dans la recherche, l’enseignement et le soin aux malades, l’approche humaine du patient étant pour lui primordiale.

Nous nous souvenons de la lecture qu’il faisait au conseil d’administration des avis longuement motivés du comité scientifique, accompagné des explications nécessaires à l’usage des non-médecins qui en atténuaient l’aridité et nous permettaient de faire les bons choix parmi les programmes de recherche qui nous étaient proposés.

Aussi, en sa séance du 29 février dernier, le conseil d’administration de notre fondation a pris acte de la décision de Guy Cornu de ne pas demander le renouvellement de son mandat d’administrateur. Il l’a fait avec regret, mais avec une immense gratitude. Il a été décidé, à l’unanimité, de lui conférer le titre de « membre fondateur » honoraire et de faire figurer son nom en tête des membres du comité d’honneur car telle est bien la place qui lui revient. En lui faisant part de ceci, nous ajoutions : « Nous sommes en quelque sortes orphelins, mais d’un père encore bien vivant que nous comptons remercier comme il convient ».

Tel est, Mesdames et Messieurs, l’objet de la réunion de ce soir. Il ne s’agit pas de reproduire la brillante et émouvante séance académique organisée en 2002 à l’occasion de l’éméritat de Guy Cornu. Ceux d’entre nous qui ont eu la chance d’y assister s’en souviennent encore. Il ne s’agit pas non plus de faire une sorte d’addendum à cette séance car l’éméritat n’a pas mis fin à l’activité de Guy Cornu : il a encore trouvé le temps de devenir président de l’Ordre des médecins du Brabant d’expression française, président du Club médical de Bruxelles, de participer à l’activité de diverses sociétés scientifiques de pédiatrie et d’hématologie, et d’œuvrer au sein de notre fondation.

Ces remerciements, nous les avons voulus simples et chaleureux : nous sommes ici tous les membres actifs de la fondation, les membres de la famille de Guy Cornu, Anne et leurs enfants et petits-enfants, que je salue, et des amis proches.

Le professeur Christiane Vermylen va évoquer Guy Cornu médecin, chercheur et professeur, et son fils Emmanuel a accepté de se livrer à un exercice bien difficile : nous parler de son père et d’évoquer la vie privée et familiale de celui dont le blason pourrait porter la fière devise : « Penser scientifiquement, agir humainement ».

Un mot encore pour faire part de mon amicale gratitude à notre vice-président, Philippe Stroobant dont le rôle parmi nous est primordial. Il l’a été cette fois encore dans la conception et l’organisation de cette soirée qui lui doit tout, et son intervention clôturera les exposés qui vont suivre.

 

Discours du Professeur Christiane VERMYLEN, membre du Conseil d’Administration de Salus Sanguinis

Cher Monsieur Cornu,

Je pourrais résumer ce que je souhaite vous dire en une seule phrase : « Heureux celui qui trace un chemin, heureux ceux qui peuvent y cheminer »1 Parmi les nombreux chemins que vous avez tracés, j’ai choisi d’en illustrer quatre.

Le premier chemin que je souhaite mentionner est celui créé par votre formidable don de l’enseignement. En tant que professeur, vous avez entraîné dans votre sillage tant d’étudiants. Sur les bancs de l’UCL nombreux sont ceux qui ont été touchés par votre enseignement, votre enthousiasme, votre façon exemplaire d’aborder l’enfant et sa famille, votre souci d’encourager chacun. Vous étiez notre exemple, notre modèle. J’ai eu le grand bonheur de faire partie de ces étudiants et même de pouvoir cheminer à vos côtés durant plusieurs années. Ce fut une belle école.

Le second est le chemin créé par le médecin : par votre souhait de soulager, de guérir, de faire progresser sans cesse la médecine. Votre engagement était sans limite, vous le viviez et vous le partagiez. Vous vous êtes toujours investi de A à Z. Vous avez réalisé de grandes premières au sein des Cliniques. Vous avez ouvert un chemin qui a permis de conforter la place des Cliniques à un niveau international. Tant de patients, tant de médecins vous sont reconnaissants. Tous ceux qui vous ont rencontré restent immensément attachés à vous.

Le troisième chemin est celui qui a ouvert de nouveaux espoirs au niveau médical, de nouveaux horizons. Grâce à la Fondation Salus Sanguinis dont vous avez été l’un des instigateurs, vous avez permis à tant de chercheurs de mener à bien leurs projets. Votre indéfectible soutien à la recherche, votre lecture attentive de tous les projets et votre capacité à les résumer nous ont toujours impressionnés.

Le quatrième est le chemin de l’Ecole que vous avez ouvert aux enfants malades. Père inspirateur, fondateur, administrateur, vous avez lutté pour obtenir un local au sein des Cliniques et à partir de là, un nouveau chemin s’est créé, celui de l’Ecole Escale. Le nombre d’implantations ne fait que croître, les chemins s’étendent et s’entrelacent. Même absent, vous continuez à abreuver nos débats. Les personnes qui vous ont côtoyé dans cette belle aventure me disent : « Son regard irradiait une forme de complicité qui « nous » rendait membres d’une même famille que ce soit l’UCL ou Escale. Son intelligence des hommes et des faits nous portait et son sourire se faisait « énergisance et bienveillance 1».

Cher Monsieur Cornu, ces chemins sont là et nous avons eu la chance de pouvoir y cheminer. Nous tâchons de les protéger et de les entretenir et nous essayons de les prolonger pour surmonter de nouveaux obstacles et aborder de nouveaux défis.

Pour tout cela, nous tous ici présents vous remercions et nous vous souhaitons un très joyeux anniversaire

1 Patrick Tyteca, Président du Conseil d’Administration de l’Ecole Escale

 

Discours de Monsieur Emmanuel Cornu1

Mesdames,

Mesdemoiselles,

Messieurs,

Permettez-moi, au nom de toute notre famille, spécialement de ma mère, de mon frère, le Professeur Olivier Cornu, et de ma sœur, le Docteur Anne-Sophie Cornu, de remercier sincèrement les Amis du Professeur Guy Cornu d’avoir organisé cette séance d’hommage en son honneur.

Assurément, les Amis du Professeur Guy Cornu sont de bons amis, de très bons amis.

S’ils m’ont invité à prendre la parole ce soir, moi un des trois enfants du Professeur Guy Cornu et le seul qui n’ait pas suivi son exemple en ne devenant pas médecin, sans doute ont-ils espéré que je puisse vous parler dans une langue vernaculaire que les non-médecins comprennent ; sans doute ont-ils également pensé qu’en donnant la parole à un enfant du Professeur Cornu ceci permettrait d’évoquer la vocation première de mon père, celle qui fut la sienne avant de devenir un spécialiste reconnu de l’hématologie et de l’oncologie. Le Docteur Guy Cornu est d’abord un pédiatre, le médecin des enfants. Un homme qui a consacré toute sa vie aux enfants, qui aime les enfants, les enfants qu’il a soignés comme ses propres enfants et ses petits-enfants2.

Cette vocation de mon père pour la pédiatrie, c’est à l’Université de Lovanium, à Kinshasa, alors dénommée Léopoldville, qu’il y répondit. Les cliniques universitaires de Lovanium étaient à cette époque encore un des fleurons du système des soins de santé en Afrique. L’on y prodiguait des soins dans des conditions similaires à celles qui prévalaient en Belgique métropolitaine. C’était encore l’époque des missionnaires aux longues barbes et aux soutanes blanches, mais c’était aussi déjà la période des rebellions de la force publique et des troubles civils qui marquèrent dramatiquement les premières années de la République indépendante du Congo. L’époque avait un côté héroïque et si on prête parfois au Professeur Guy Cornu d’être un « enragé » de son travail c’est sans doute au Congo qu’il fut atteint de ce virus. En voici le récit : soignant aux urgences un jeune congolais qui avait été attaqué par un chien errant, le Docteur Cornu fut mordu à sang par ce jeune patient. Celui-ci avait ainsi réagi à la vue d’un verre d’eau que lui tendait une infirmière, à l’époque une religieuse flamande3. Le diagnostic fut vite posé. La phobie de l’eau est un symptôme de la rage. Malheureusement, aucun vaccin n’était alors disponible au Congo et il ne semblait pas y avoir de réserves en Belgique de sorte que le destin du Docteur Guy Cornu aurait pu s’arrêter prématurément au milieu des années 1960. C’est d’ailleurs ce que dut penser ma chère Maman. Alors qu’elle était enceinte de mon frère aîné et qu’elle ignorait tout de l’incident que mon père venait de vivre au service des urgences, elle vit au milieu de l’après-midi débarquer chez elle le Recteur magnifique de l’Université de Lovanium, Monseigneur Luc Gillon, accompagné du Doyen de la Faculté de médecine, le Professeur Roger Eeckels. Sans faire preuve d’un excès de précaution, tous deux lui présentèrent leurs condoléances anticipées car mon père était alors, selon leurs dires, condamné à mourir dans les septante-deux heures dans d’atroces souffrances.

Puisque nous sommes tous là, vous vous en doutez, il n’en fut rien. Heureusement, grâce à un message envoyé par radio amateur et capté à Genève, et surtout grâce à la Fondation Rockefeller, un DC-8 fut affrété sous le bénéfice de l’urgence depuis les Etats-Unis pour apporter le précieux sérum et mon père fut sauvé.

De cet épisode qui pour notre famille connut un dénouement heureux, mais qui fut tragique pour l’enfant que mon père soignait, car lui ne put être sauvé à temps, le Docteur Cornu a conservé cette volonté inébranlable de lutter contre la souffrance et la maladie. Elle marque toute sa vie, bien davantage que sa seule vie professionnelle.

A Lovanium, mon père va s’intéresser aux maladies du sang et c’est là qu’il devint très vite et très jeune un des meilleurs spécialistes des drépanocytoses, maladies particulièrement fréquentes dans les populations d’origine africaine subsaharienne.

Sa formation d’hématologue, il la compléta ensuite à Paris, à l’Hôpital des Enfants malades.

Achevant sa formation à Paris en 1966, Papa aurait dû regagner le Congo. Sa nomination comme Professeur à l’Université de Lovanium l’y attendait. Les événements qui secouèrent alors la République congolaise, la percée que venaient de faire depuis la région des Grands Lacs le mercenaire belge Jean Schramme et toute son affreuse clique, allaient toutefois bousculer les relations déjà difficiles entre la Belgique et son ancienne colonie, ainsi que les plans de carrière du Docteur Cornu. Un retour au Congo n’était plus envisageable.

Le Docteur Cornu fut alors appelé par le Professeur Roger De Meyer, chef du département de pédiatrie au sein des cliniques universitaires Saint-Raphaël, à fonder au sein des cliniques de l’Université catholique de Louvain, à l’époque encore unitaire, la première unité d’hématologie pédiatrique.

Il fallait alors avoir la foi en la science et une grande espérance pour mener à bien cette tâche. En 1967, quand le Docteur Cornu commença à soigner les enfants atteints de la leucémie, le taux de guérison était de 0 %. Tous les enfants frappés de cette terrible maladie mourraient. C’est alors qu’avec le Professeur Gerhard Sokal et toute l’équipe qui fut la sienne à Saint-Raphaël, à Leuven, puis après à Saint-Luc, à Woluwe, ils se lancèrent dans les premiers traitements de chimiothérapie et réussirent sinon à guérir, du moins à permettre des rémissions de plus en plus longues.

Une étape très importante dans la lutte contre la leucémie fut assurément la première greffe de moelle osseuse en Belgique, que le Docteur Cornu accomplit en 1972. Une seconde étape fut la greffe de sang de cordon qu’il fut également le premier à accomplir en Belgique en 1988. Ces premières médicales allaient changer la donne.

Ainsi, en 2002, au moment où notre père prit son éméritat, plus de 90 % des enfants atteints de leucémie pouvaient espérer non plus une rémission, mais bien une guérison.

Les progrès de la médecine sur ces quarante dernières années relèvent sans doute du miracle, mais aussi de la ténacité des équipes de recherche, de ceux qui ont dispensé les soins, médecins et infirmières, mais aussi du soutien qu’ils ont reçu d’associations telles en particulier que la Fondation Salus Sanguinis.

Notre père nous le dit souvent, pour lui, un de ses enfants malades est vraiment guéri quand, plusieurs années après avoir posé le diagnostic médical de guérison, il les voit se marier et avoir eux-mêmes des enfants en pleine santé. Il nous le répète de temps en temps, c’est là pour lui la plus belle récompense de tout son travail.

Les premières médicales que notre père réalisa, quand nous étions enfants, il ne nous en parlait pas. Il préférait s’intéresser à nous plutôt que de souligner ses réussites professionnelles. Ce n’est que plus tard, spécialement à l’occasion de son éméritat, que l’on prit réellement conscience du chemin parcouru.

Enfants, nous n’imaginions pas les souffrances indicibles auxquelles notre père était confronté dans sa vie de pédiatre et hématologue. Pour nous, c’était un père qui tout en étant disponible pour ses enfants aux moments importants de leur vie, consacrait sa vie à son travail, c’est-à-dire aux soins de ses patients, à la clinique et à l’enseignement. Ses journées étaient longues. En semaine, ses enfants le voyaient habituellement tôt le matin, quand il nous conduisait au Collège dans ses Peugeot 504 successives, avant de rejoindre la clinique d’où il revenait tard dans la soirée. Souvent, mes parents dînaient bien après nous, à l’heure espagnole. Papa travaillait le samedi comme les autres jours de la semaine, sauf qu’après une certaine époque, il n’a plus mis de cravate le samedi. Le dimanche, il faisait souvent encore un tour de salle dans la matinée avant d’essayer de monter un peu à cheval ou de jardiner, ses seules passions sportives. La nuit, le téléphone sonnait souvent, à n’importe quelle heure. Ma chambre jouxtant celle de mes parents, j’entendais sa voix grave comme dans un murmure, rectifiant posément la dose d’un traitement. Puis, parfois, je l’entendais se lever, se rhabiller et rejoindre la clinique ou bien simplement descendre dans son bureau et méditer pendant plusieurs heures avant de commencer la journée suivante comme si rien n’était advenu. Soigner les enfants malades de la leucémie, des enfants auxquels il était toujours très attaché, n’est évidemment pas un métier facile. C’est d’ailleurs davantage qu’une profession ; c’est sans doute une mission ou plutôt un sacerdoce.

Cette mission, c’est grâce à la Fondation Salus Sanguinis qu’il a pu l’accomplir avec tant de soin et qu’il put la continuer bien après son éméritat dans ses tâches de conseil.

Cet engagement se poursuit aujourd’hui avec ses successeurs, le Professeur Christiane Vermylen, chef du département de pédiatrie aux Cliniques universitaires Saint-Luc, le Professeur Bénédicte Brichard, chef du Service d’hématologie pédiatrique, et le Professeur Coulie, qui lui succède comme Secrétaire scientifique au sein de la Fondation Salus Sanguinis. Cet engagement se poursuit avec ceux qu’il a formés, et qui font preuve du même dévouement. C’est là également une des plus belles récompenses de notre père, de pouvoir constater que ce en quoi il a cru, ce sur quoi il a bâti toute sa vie, se poursuit aujourd’hui sous le signe du même engagement et de la même passion.

Dans sa première lettre, Saint Jean l’Evangéliste écrit qu’il faut aimer non pas avec des paroles et des discours, mais par des actes et en vérité. Depuis 1962, date de sa prestation du serment d’Hippocrate, ce sont beaucoup d’actes que les mains de notre père ont posés, des actes qui ont soulagé la souffrance et souvent, mais pas toujours, ont pu guérir.

« Mon père ce héros, au sourire si doux », écrivait Victor Hugo dans son célèbre poème « Après la bataille ».

Aujourd’hui, après avoir œuvré pendant plus de quarante ans au sein du conseil d’administration de Salus Sanguinis, le Professeur Guy Cornu choisit, à la veille de ses quatre-vingts ans, de laisser la place à une nouvelle génération pour mieux servir cette fondation qui lui est chère. C’est là le choix de la sagesse et de la raison, un choix qu’il a posé lui-même et qui ne l’empêchera pas de poursuivre l’engagement de sa vie qui est aussi l’engagement de la Fondation Salus Sanguinis.

Grâce à la générosité de ses si bons amis, en particulier je crois celle de Philippe Stroobant, je vous remercie d’avoir permis à ceux qui lui sont chers, spécialement à sa famille, de lui redire publiquement toute notre affection et notre reconnaissance et, si vous le permettez, de lui souhaiter en notre nom à tous et en prévision de ce mercredi 19 octobre prochain qui marquera ses quatre-vingts ans, un très heureux anniversaire.

 

Discours de Monsieur Philippe Stroobant, Vice-Président du Conseil d’Administration de Salus Sanguinis

Mesdames,

Messieurs,

Chers Amis,

Nous allons passer dans quelques instants à la partie musicale de notre soirée.

Mais avant cela, permettez-moi, mon cher Guy, de vous adresser quelques mots au nom de la profonde amitié qui nous unit.

Ces propos, je souhaite aussi les étendre à Anne, parce que cette amitié, nous la partageons aussi avec vous, chère Anne.

L’amitié, n’est-elle pas après l’amour familial, la seconde plus belle réalisation de l’homme ? Oui, je le crois.

« Bannir l’amitié de sa vie, c’est vouloir ôter au monde le soleil ».

Cicéron disait à son ami Titus Pomponius : « j’ai tant de sujets d’enthousiasme et de préoccupations qu’il me semble que si je pouvais me faire entendre de toi, l’Ami, l’enthousiasme serait beaucoup avivé, les préoccupations dissipées au cours d’une seule promenade ».

Combien de fois, cher Guy, ces promenades ne les avons-nous pas pratiquées à Zermatt, en suivant les jeunes de « A Chacun Son Cervin » alors que vous nous faisiez l’énorme plaisir, Anne et vous, de venir nous visiter en Suisse, le temps d’un weekend.

Cela se passait souvent dans l’effort car les pentes à Zermatt sont bien rudes.

Mais aider ces jeunes à tourner la page de leur maladie, était pour nous trois, un tel ciment à notre amitié.

Permettez-moi de raconter une anecdote :

Un jour de juillet 2005, nous étions tellement engagés dans une discussion, vous et moi, Guy, que nous ne nous étions même pas aperçu du mauvais chemin suivi.

En levant soudainement les yeux, nous vîmes le reste de la cordée sur l’autre versant de la vallée. Le guide, Rudi Steindl, vint à notre recherche, l’air un peu bougon de la marche forcée que notre distraction commune lui avait imposée. Pour rejoindre les autres, il nous fallut nous lancer dans un passage très escarpé au-dessus d’un torrent, presque une arête sommitale, et faire à pied quelques kilomètres de montagne supplémentaires.

D’un pas « lent », « sûr » et « décidé », nous finirent par retrouver les autres.

Mais le lundi matin, un vent d’inquiétude souffla sur Saint-Luc. Vos assistants vous voyaient assis sur une chaise, sans plus pouvoir bouger. Ils ne mesuraient pas combien vous étiez « perclus » de courbatures.

Et comme demain, notre histoire ensemble au sein de Salus Sanguinis ne peut plus se poursuivre, imaginons comment cultiver autrement cette amitié. C’est mon voeu le plus cher.

Pour avoir soutenu mon projet « A Chacun Son Cervin » depuis le tout début, (il n’aurait d’ailleurs probablement pas vu le jour sans vous), pour tous ces moments heureux passés ensemble, pour cette amitié, MERCI.

Je ne suis pas le seul, ce soir, à avoir des raisons de vous remercier. Nous sommes tous ici, autour de vous et pour des raisons diverses à vous dire « merci », mon cher Guy.

Avec Bernadette, lorsque nous étions plongés dans les préparatifs de cette soirée, nous avions imaginé que pour le dessert qui nous attend vers 21h, nous allions solliciter chacun d’entre vous, vous demandant, à vous tous ici présents, d’amener chacun sur quelques mètres, une brique du gâteau sur laquelle on aurait écrit le mot « merci ».

Mais avec un peu de réflexion, nous allions vite comprendre que le gâteau ainsi érigé, allait toucher le plafond du Sainte Anne; il nous fallut trouver une autre idée.

A Stockholm, on fête le prix Nobel, à Paris, le prix Goncourt et pourquoi pas le prix Hippocrate à Bruxelles au Château Sainte Anne.

Nous l’avons imaginé ainsi et nous l’appelons de tous nos voeux : le prix Hippocrate viendrait récompenser la carrière d’un médecin clinicien qui a réussi avec excellence à combiner tout au long de sa carrière, la pratique d’une médecine incluant les innovations de la recherche et le souci constant de l’humanisation des soins.

Si nous parlons en termes d’excellence dans la pratique médicale, recherche de pointe et humanisation des soins ne peuvent aller l’un sans l’autre; c’est notre profonde conviction.

Imaginons à présent que nous soyons ici, chacun, membre du jury du prix Hippocrate, sachez alors, mon cher Guy, qu’il vous est décerné ce soir à l’unanimité.

Je vous propose d’applaudir Guy

Nous avons voulu donner ce soir une place à la musique.