L’insuline aspart à action ultra-rapide FIASP® : un nouvel atout dans le traitement du diabète

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Mirela Morisca-Gavriliu, Michel P. Hermans, Dominique Maiter, Vanessa Preumont Publié dans la revue de : Février 2018 Rubrique(s) : Diabétologie
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Résumé de l'article :

L’insuline FIASP (« faster insulin aspart ») est une nouvelle formulation originale d’insuline qui associe l’insuline aspart et deux excipients, à savoir une vitamine (niacinamide) et un acide aminé (L-arginine), en vue d’accroitre le taux d’absorption initial de l’insuline après injection sous-cutanée et de favoriser ainsi un effet anti-hyperglycémiant plus précoce au moment des repas. Son profil d’efficacité et son innocuité ont été étudiés dans le programme d’essais cliniques Onset. Ces premières études cliniques ont démontré que l’utilisation de la FIASP est associée à un meilleur contrôle glycémique post-prandial précoce, en comparaison à l’aspart chez des sujets diabétiques de type 1 et de type 2. Cette insuline analogue FIASP devrait être commercialisée en Belgique très prochainement.

Mots-clés

Diabète, insuline aspart, analogue rapide

Que savons-nous à ce propos ?

Idéalement, les insulines injectées juste avant le repas devraient agir très rapidement et avoir une durée d’action limitée à quelques heures pour mimer la sécrétion physiologique post-prandiale d’insuline du sujet normoglycémique. Les insulines analogues rapides se rapprochent de ce type d’action sans encore y arriver parfaitement.

Que nous apporte cet article ?

Il nous décrit les propriétés pharmacocinétiques et les résultats des études cliniques concernant une nouvelle insuline analogue à effet très rapide, FIASP (pour « faster insulin aspart ») qui associe l’insuline aspart à deux excipients en vue d’en accroitre le taux d’absorption initial après injection sous-cutanée. Cette insuline sera bientôt disponible sur le marché belge.

Article complet :

Introduction

La physiologie de l’homéostasie glucidique chez le sujet non diabétique montre que l’insulinémie basale est stable entre les repas alors que les pics insuliniques post-prandiaux surviennent très rapidement et sont de courte durée. Pour s’approcher de ce profil d’action, les insulines prandiales injectées devraient ainsi idéalement agir très rapidement et avoir une durée d’action limitée à quelques heures. Trois analogues d’insuline à action ultra-rapide ont été synthétisés depuis les années 90 et sont disponibles sur le marché belge (lispro - Humalog®, aspart - NovoRapid®, et glulisine - Apidra®). Leurs profils d’action sont plus physiologiques que ceux des insulines humaines actuellement disponibles, puisqu’elles agissent deux fois plus rapidement et leurs effets biologiques durent deux fois moins longtemps que ceux de l’insuline humaine ordinaire (Actrapid®, Insuman Rapid®, Humuline Regular®).

Le développement de ces analogues d’insuline à action rapide a représenté une avancée significative dans le traitement des patients diabétiques, en réduisant de manière significative les excursions glycémiques post-prandiales, en limitant la survenue d’hypoglycémies à distance des repas, et en rendant optionnelle la prise systématique de collations inter-prandiales (1-3). Après de nombreuses années d’utilisation, on doit toutefois constater que le contrôle des glycémies post-prandiales reste encore imparfait, et ce d’autant plus que beaucoup de patients diabétiques de type 1 disposent maintenant de données précises de leurs excursions glycémiques, issues de la mesure continue du glucose interstitiel. Il existe donc un besoin réel non encore satisfait pour des insulines ayant un début d’action (encore) plus rapide et une durée d’action (encore) plus brève.

L’insuline aspart à action ultra-rapide (FIASP)

L’insuline FIASP (pour « faster insulin aspart » ; FIASP®) est une nouvelle formulation d’insuline associant à l’insuline analogue aspart deux excipients originaux, à savoir une vitamine (niacinamide), qui modifie l’absorption sous-cutanée, et un acide aminé (L-arginine) qui stabilise la molécule (4). Cette association améliore le taux d’absorption initial de l’insuline et induit de cette manière un effet anti-hyperglycémiant plus précoce. Cette formulation innovante mime davantage la riposte insulinique post-prandiale physiologique d’un sujet normoglycémique. En comparaison à l’aspart et après injection sous-cutanée, l’insuline FIASP apparait deux fois plus rapidement dans le flux sanguin (4 minutes vs. 9 minutes), produisant une insulinémie moyenne deux fois plus élevée durant les 30 premières minutes qui suivent l’injection (4). Le pic insulinique survient une heure après l’injection (contre deux heures pour l’insuline humaine ordinaire) et la durée d’action est de 3 à 4 heures (contre 6 à 8 heures pour l’insuline humaine ordinaire). L’exposition totale cumulée à l’insuline (soit l’aire sous la courbe) reste toutefois la même pour l’insuline FIASP comparée à l’insuline aspart pour une dose injectée identique. La FIASP offre ainsi la possibilité d’un schéma posologique d’administration plus souple puisque l’injection peut être réalisée de deux minutes avant jusqu’à 20 minutes après le début d’un repas, sans compromettre la maîtrise glycémique globale (4)

Le profil d’efficacité et d’innocuité de la FIASP a été étudié dans le programme d’essais cliniques Onset. Ce programme reprend 4 études cliniques menées chez plus de 2100 sujets diabétiques de type 1 et de type 2. Ces études ont démontré notamment que l’utilisation de la FIASP est associée à un meilleur contrôle glycémique en comparaison à l’aspart chez des sujets diabétiques de type 1 (5) et de type 2 (7).

Principaux résultats des études onset et des études corollaires

L’étude Onset 1 (5) est une étude multicentrique menée en double aveugle chez 1143 diabétiques de type 1, d’une durée de 26 semaines. Les patients ont été randomisés pour recevoir, dans le cadre d’un schéma basal-bolus (BB), la FIASP durant le repas, la FIASP après le repas ou l’insuline aspart, en association à une injection quotidienne d’insuline lente (detemir). A l’issue de la période de suivi de 6 mois, la réduction moyenne d’HbA1c était de 0,32 % dans le groupe FIASP en administration prandiale vs. 0,17 % dans le groupe aspart en administration prandiale (p=0,019), alors que l’administration postprandiale de FIASP entrainait une amélioration de l’équilibre glycémique similaire à l’administration prandiale d’aspart (-0,15 %). L’administration prandiale de FIASP était associée à un meilleur contrôle de la glycémie post-prandiale induite par l’administration d’un repas-test, tandis que l’administration de FIASP après le repas n’était pas associée à une perte d’efficacité clinique, ni à une majoration des hypoglycémies. Tout récemment, ces données ont été confirmées dans une étude de suivi à 52 semaines chez 761 de ces patients (6).

L’étude Onset 2 (7) est une étude multicentrique menée en double aveugle durant 26 semaines chez 689 sujets diabétiques de type 2, dans le cadre d’un schéma BB associé à la metformine. Les patients ont été randomisés pour recevoir de la FIASP ou de l’insuline aspart pendant les repas. La baisse d’HbA1c était comparable au terme de la période de suivi alors que l’élévation post-prandiale de la glycémie était significativement réduite avec FIASP.

Dans l’étude Onset 3, 236 patients porteurs d’un diabète de type 2 insuffisamment contrôlé ont reçu soit un traitement par antidiabétiques oraux associé à une injection d’insuline basale au coucher, soit un traitement par schéma BB avec FIASP associé à la metformine (8). Après 18 semaines de ces traitements, l’HbA1c moyenne avait baissé de 1,1 % dans le groupe BB-FIASP et seulement de 0,2 % dans le groupe avec insuline basale (p<0,001). L’élévation des glycémies post-prandiales était également plus faible dans le groupe BB-FIASP mais au prix d’hypoglycémies plus fréquentes et d’un gain pondéral légèrement supérieur (8).

L’insuline FIASP a également été comparée à l’insuline aspart en infusion sous-cutanée continue (ISCC) au moyen d’un infuseur (pompe) externe. Son efficacité est globalement similaire mais avec une exposition plus précoce et plus importante à l’insuline au cours des 30 premières minutes suivant l’instauration du traitement (9). De ce fait, l’élévation de la glycémie après un repas-test est moindre avec FIASP (10).La sécurité d’emploi en pompe sous-cutanée a également été confirmée, sans survenue accrue d’incidents hyperglycémiques liés à des occlusions de cathéter ou d’hypoglycémies sévères, au cours de l’étude onset 4, qui a inclus 37 patients diabétiques de type 1 traités par ISSC pendant 6 semaines (11).

Notons enfin que les données pharmacocinétiques ainsi que les résultats en termes d’efficacité et d’innocuité obtenus chez les adultes viennent d’être confirmés récemment et sont similaires chez les enfants et les adolescents (12).

L’effet indésirable le plus fréquent est, comme pour les autres insulines, la survenue d’hypoglycémies. Par ailleurs, la tolérance à l’insuline FIASP est excellente et les autres évènements défavorables ont été rencontrés de manière comparable dans les différents groupes étudiés et ce dans tous les essais cliniques mentionnés.

Conclusions

FIASP est une formulation innovante associant à l’insuline analogue rapide aspart deux excipients originaux, ce qui permet d’accélérer sa vitesse d’absorption sous-cutanée. Elle reproduit ainsi mieux que les insulines analogues rapides actuelles la réponse insulinique physiologique post-prandiale d’un sujet normoglycémique. Les études cliniques ont effectivement établi une supériorité de FIASP par rapport à l’insuline aspart concernant le contrôle des pics glycémiques post-prandiaux précoces chez les sujets diabétiques. L’administration de cette insuline est également plus flexible, ce qui offre un confort supplémentaire aux patients. L’insuline FIASP® a déjà obtenu l’accord de remboursement et devrait être disponible en Belgique très prochainement. Cette insuline analogue devrait constituer un nouvel atout dans le traitement du diabète sucré.

Affiliations

Cliniques universitaires Saint-Luc
Service d’Endocrinologie et Nutrition
B-1200 Bruxelles

Correspondance

Dr Mirela Morisca Gavriliu
mirela.morisca@uclouvain.be

Références

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