La transplantation hépatique dans le cadre du cancer hépatocellulaire : place de l’immunosuppression et du traitement du rejet à propos de la récidive cancéreuse. Résultats d’une étude pluricentrique

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Maxime Foguenne, Samuele Iesari, Jan Lerut Publié dans la revue de : Novembre 2018 Rubrique(s) : Mémoires de Recherche Clinique
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Résumé de l'article :

Promoteur

Pr Jan Lerut

Co-promoteur

Dr Samuele Iesari

Mots-clés

Transplantation hépatique, cancer hépatocellulaire, récidive cancéreuse, rejet cellulaire aigu, immunosuppression

Article complet :

INTRODUCTION

Dévolue initialement au traitement des patients cirrhotiques, la transplantation hépatique (TRH) ne cesse de prendre une part de plus en plus importante dans le traitement du cancer hépatocellulaire (CHC). La chirurgie représente l’unique traitement curatif d’une telle pathologie. Il ne faut néanmoins pas perdre de vue qu’un patient atteint de cette maladie souffre en fait de deux affections : la cirrhose et le cancer. La TRH traite les deux … Il est dès lors compréhensible que cette thérapie soit d’une part particulièrement prometteuse mais demeure néanmoins complexe. Suite au manque de greffons, les indications doivent être posées rigoureusement : la récidive de la maladie et le décès précoce représentant un échec. Au départ, ce traitement ne montrait que très peu de réussite en terme de survie globale et de survie sans récidive de la maladie. Tout changea en 1996 avec l’introduction des critères de Milan par Mazzaferro. En respectant ces derniers, la TRH pour CHC montre pratiquement les mêmes résultats à long terme par rapport à une transplantation réalisée pour pathologie bénigne. Il est apparu rapidement que ces critères, purement morphologiques, étaient trop restrictifs. Ce constat a mené au développement de scores élargissant les indications de TRH pour CHC. Ces derniers prennent en compte, à l’heure actuelle, des critères morphologiques et biologiques aussi bien statiques que dynamiques. Dans ce contexte, il est très peu fait état du rôle joué par l’immunosuppression (IS) dans l’incidence de la récidive tumorale. Cette information est étonnante quand on connaît le rôle crucial joué par le système immunitaire en tant que barrière anti-cancer.

 

MATÉRIEL ET MÉTHODE

Cette étude observationnelle rétrospective tente de combler en partie cette lacune. Elle analyse l’impact du traitement d’un rejet cellulaire aigu (RCA) sur la survenue d’une récidive cancéreuse dans une large population pluri-centrique européenne de 781 patients transplantés pour CHC entre février 1985 et juin 2016. Après appariement via le score de propension, 116 patients ayant été traités pour RCA par bolus de corticostéroïdes ont été comparés à 115 patients ayant présenté un rejet (histologiquement prouvé) non-traité car sans répercussion clinique ou n’ayant pas eu du tout de rejet.

 

RÉSULTATS

Le groupe traité a présenté un taux de récidive cancéreuse 18 fois supérieur au groupe contrôle (16.4 % vs. 0.9 % ; p < 0.0001). Toutes les récidives sont survenues après traitement du rejet. Après analyse par une régression multivariée selon Cox, l’usage de corticostéroïdes comme traitement d’un RCA apparaît être un facteur de risque indépendant de rechute (HR = 14.2 ; p = 0.01). En outre, la poursuite des stéroïdes durant plus de 12 mois ainsi que le renforcement de l’IS après RCA sont des facteurs associés à un taux plus élevé de récidive : 57.6 % vs. 32.0 % (p = 0.04) et 68.4 % vs. 37.1 % (p = 0.02).

 

CONCLUSION

Il semble donc que le traitement du rejet par corticostéroïdes est un facteur de risque de rechute cancéreuse. Il en est de même en ce qui concerne l’intensification du traitement immunosuppresseur dans le décours du rejet. D’autres études, prospectives, seront néanmoins nécessaires afin de non seulement confirmer l’impact de l’IS sur la récidive de CHC mais aussi d’étudier ce phénomène plus en profondeur.

 

AFFILIATIONS

Cliniques universitaires Saint-Luc, Service de Transplantation Abdominale, avenue Hippocrate 10, B-1200 Bruxelles