La prise en charge des hanches dysplasiques

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Maïté Van Cauter, Louis Gossing, Jean-Emile Dubuc, Olivier Cornu Publié dans la revue de : Février 2017 Rubrique(s) : Chirurgie orthopédique et traumatologie
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Résumé de l'article :

La chirurgie de remplacement articulaire, quoiqu’elle ait laissé espérer offrir des résultats plus durables avec le développement des implants non cimentés et des couples de friction avec une usure plus faible, et ait vu ses indications s’accroître et s’étendre vers des patients plus jeunes, ne peut encore garantir au patient la longévité qui permettrait de n’avoir pas à considérer une reprise ultérieure. Le remplacement n’offre par ailleurs pas systématiquement le confort d’une articulation native. Le développement de techniques permettant de préserver l’articulation native et ralentir ou prévenir l’apparition de l’arthrose, revêt dès lors un intérêt tout particulier. La réalisation d’une ostéotomie péri-acétabulaire (PAO) dans la dysplasie de hanche rentre dans ce cadre, en permettant d’augmenter la couverture acétabulaire par une réorientation du cotyle. Le recours à une reconstruction préopératoire en trois dimensions et à une planification des ostéotomies et du mouvement de l’acétabulum permettent de prévoir les corrections. Le recours à des guides de coupe et à un scanner peropératoire permettent d’assurer le geste avec précision et d’en conserver le contrôle tout au long de la chirurgie. La PAO doit donc être considérée à l’heure actuelle comme le traitement de choix des dysplasies acétabulaires de l’adulte jeune, avant toute évolution arthrosique.

Mots-clés  Ostéotomie péri-acétabulaire, dysplasie hanche, chirurgie conservatrice hanche

Article complet :

INTRODUCTION

La dysplasie de hanche est une malformation de l’articulation coxo-fémorale occasionnant un déficit de couverture de la tête fémorale. Celui-ci entraine une coxarthrose prématurée qui conduira le patient à un remplacement articulaire si la gène fonctionnelle et la douleur sont importantes. Un des traitements recommandés chez l’adulte jeune est la réalisation d’une ostéotomie péri-acétabulaire (PAO) (3). Cette opération va augmenter la couverture acétabulaire par une réorientation du cotyle. Il permet de n’envisager une arthroplastie secondaire que dans un tiers des cas après 20 ans de suivi. Cette chirurgie est cependant relativement plus complexe chez l’adulte, en l’absence de remodelage lié à la croissance comme cela est observé traditionnellement chez l’enfant (1). Elle connaît un nouvel intérêt en raison des apports technologiques de la planification en trois dimensions, des guides de coupe et de l’imagerie scanner peropératoire.

DIAGNOSTIC DE LA DYSPLASIE

La découverte d’une dysplasie de hanche est souvent fortuite ou à l’occasion de gènes modérées. Le bilan repose sur des radiographies du bassin. La coxométrie permet de préciser l’architecture de la hanche et la couverture de la tête fémorale par le cotyle (Figure 1). Les valeurs angulaires mesurées permettront d’orienter les indications chirurgicales d’ostéotomie fémorale ou cotyloïdienne. Elle est réalisée sur une incidence de bassin de face couché et/ou debout, pour la recherche d’une asymétrie de longueur des membres inférieurs, et sur un faux profil de Lequesne (Figure 2).

Le bilan radiologique est complété par un arthro-scanner. Ce dernier permet le diagnostic des lésions cartilagineuses ainsi qu’une visualisation en 3D de l’orientation du cotyle. L’angle d’antéversion du cotyle se mesure sur une coupe scanner passant par le centre de la tête fémorale. La ligne passant par le bord externe du bord antérieur du cotyle et le bord externe du bord postérieur du cotyle réalise le plan d’ouverture du cotyle. L’angle réalisé par ce plan avec le plan sagittal du bassin (qui n’est pas toujours celui de la table si le patient n’est pas strictement horizontal) définit l’angle d’antéversion du cotyle. L’antéversion du cotyle est d’environ 15 degrés +/- 3 degrés chez l’homme et 20 degrés +/- 7 degrés chez la femme. Trois types de dysplasies cotyloïdiennes sont identifiées (6) : découverture antéro-supérieure (30%), postéro-supérieur (34%) ou globale (36%).

Plusieurs facteurs ont été identifiés comme influençant négativement l’évolution d’une PAO (Tableau 1). Certains sont préopératoires et doivent a priori faire réfléchir avant d’engager le patient vers cette solution, à moins que la PAO ne facilite l’implantation ultérieure d’une arthroplastie. Le degré d’atteinte chondrale doit absolument être pris en compte. La classification de Tönnis (Tableau 2) qui fait référence dans l’évaluation de l’arthrose est peu reproductible (7) et justifie pleinement le recours à l’arthroscanner dans l’évaluation de l’état du cartilage. D’autres tiennent à la qualité de l’orientation obtenue en post-opératoire. Ce sont sur ces derniers facteurs que les innovations nous permettent d’agir.

INNOVATION EN PAO

La reconstruction 3D permet d’optimaliser la planification pré-opératoire (2). Le chirurgien peut planifier ses traits d’ostéotomie et observer le déplacement qu’il induit au cotyle. Il peut ainsi réaliser virtuellement les mesures de coxométrie et s’assurer de la qualité de la correction prévue. Le chirurgien valide la planification des coupes et de la correction visée. Il fait fabriquer des guides de coupe sur mesure, obtenu par impression 3D, guidant la scie ou l’ostéotome lors des coupes osseuses, guidant la correction attendue (5). Ces guides apportent l’avantage d’accroître la précision et permettent de diminuer l’exposition chirurgicale, le temps opératoire et les pertes sanguines (4). Le chirurgien peut enfin réaliser un scanner per-opératoire (Zeego) et peut ainsi confirmer en décours d’intervention la bonne correction et orientation du cotyle ainsi que le bon positionnement du matériel de synthèse, avant d’achever son intervention et de réveiller le malade. L’ensemble des ces techniques permettent d’optimaliser le résultat clinique (Fig. 3 et 4).

CONCLUSION

La PAO est donc reconnue à l’heure actuelle comme le traitement de choix des dysplasies acétabulaires de l’adulte jeune. La prise en charge doit être précoce, avant le stade 2 selon Tönnis dans l’évolution arthrosique. Elle permet d’éviter ou tout au moins significativement retarder la mise en place d’une prothèse totale de hanche.

Affiliations

Cliniques universitaires Saint-Luc
Chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur
Avenue Hippocrate 10
B-1200 Bruxelles

Correspondance

Pr Olivier Cornu
olivier.cornu@uclouvain.be

Références

  1. Grammatopoulos G, Wales J, Kothari A, Gill HS, Wainwright A, Theologis T. What is the early/mid-term Survivorship and functional outcome after bernese periacetabular osteotomy in a pediatric surgeon practice? Clin Orthop Relat Res 2016;474(5):1216-23. DOI: 10.1007/s11999-015-4386-7.
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  2. Inaba Y, Kobayashi N, Ike H, Kubota S, Saito T. Computer-Assisted rotational acetabular osteotomy for patients with acetabular dysplasia. Clin Ortho Surg 2016; 8:99-105.
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  3. Lerch T, Steppacher S, Liechti E, Tannast M, Siebenrock K. One-third of hips after periacetabular osteotomy survive 30 years with good clinical results, no progression of arthritis, or conversion to THA. Clin Orthop Relat Res 2016 Nov; DOI 10.10007/s11999-016-5169-5.
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  4. Luo D, Zhang H, Zhang W. Comparison of three approaches of Bernese periacetabular osteotomy. Ther Clin Risk Manag 2016; 12: 67-72.
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  5. Murphy R, Armiger R, Lepistö J, Armand M. Clinical evaluation of a biomechanical guidance system for periacetabular osteotomy. J Ortho Surg and Res 2016 11:36 DOI 10.1186/s13018-016-0372-3.
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  6. Nepple J, Wells J, Ross J, Bedi A, Schnoenecker P, Clohisy J. Three patterns of acetabular deficiency are common in young adult patients with acetabular dysplasia. Clin Orthop Relat Res 2016 Nov. DOI 10.1007/s11999-016-5150-3.
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  7. Valera M, Ibañez N, Sancho R, Tey M. Reliability of Tönnis classification in early hip arthritis: a useless reference for hip-preserving surgery. Arch Orthop Trauma Surg 2016 ;136(1):27-33. doi: 10.1007/s00402-015-2356-x.
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